Big Eyes : Grands Yeux Et Petite Bouche
Tim Burton ! Un cinéaste sujet à toute les passions...non pardon, petite modification, QUI ETAIT sujet à toute les passions. Depuis maintenant une bonne décennie, le golden boy ténébreux d'Hollywood est un peu l'ombre de lui même. Réalisateur impie qui savait faire de la commande made in Warner des pépites à l'acide nitrique, il enjolivait de sa candeur morbide le quotidien de millions de jeunes (et moins jeunes) spectateurs nourris à l'american way of life. Oui, dans les années 90, Tim Burton était un maestro. Tout de même, ressassé le passé et se plaindre de ses nouvelles productions est presque devenu un poncif et chacun reste libre d'apprécier ses derniers films.
Cependant, lorsque est venue la nouvelle que Burton se lançait dans une "histoire vraie" de faussaire dans le milieu artistique et de toiles avec des petits nenfants aux grands yeux tristes, mon admiration pour l'ancien Tim, celui d'Ed Wood, s'est mise en berne, appâtée par une idée curieuse. Et si Burton abandonnait pour un temps les adaptations et autres remake foireux pour aller vers un sujet simple où transparaitrait, au delà de sa personnalité toujours visible, son mordant de naguère?
L'histoire véridique est bien loin du conte de fée. Dans les années 50 aux US, Margaret Ulbrich, claque la porte de son premier mariage et prend la route avec sa jeune fille direction San-Francisco. Elle y rencontre un peintre cabotin et charmeur, Walter Keane, très sensible aux étranges portraits d'enfants aux yeux difformes que la peintre vend dans les foires pour une bouchée de pain. Ils se marient et Walter se charge de vendre leurs toiles. Par un concours de circonstance un peu forcé, Walter Keane endosse la paternité du travail de sa femme. Dépossédée de son œuvre personnelle et travaillant dans l'ombre de son mari mégalomaniaque , Margaret s'enfonce dans un mutisme complice. Au nom de quoi devrait-elle garder le silence plus longtemps?
Cependant, lorsque est venue la nouvelle que Burton se lançait dans une "histoire vraie" de faussaire dans le milieu artistique et de toiles avec des petits nenfants aux grands yeux tristes, mon admiration pour l'ancien Tim, celui d'Ed Wood, s'est mise en berne, appâtée par une idée curieuse. Et si Burton abandonnait pour un temps les adaptations et autres remake foireux pour aller vers un sujet simple où transparaitrait, au delà de sa personnalité toujours visible, son mordant de naguère?
L'histoire véridique est bien loin du conte de fée. Dans les années 50 aux US, Margaret Ulbrich, claque la porte de son premier mariage et prend la route avec sa jeune fille direction San-Francisco. Elle y rencontre un peintre cabotin et charmeur, Walter Keane, très sensible aux étranges portraits d'enfants aux yeux difformes que la peintre vend dans les foires pour une bouchée de pain. Ils se marient et Walter se charge de vendre leurs toiles. Par un concours de circonstance un peu forcé, Walter Keane endosse la paternité du travail de sa femme. Dépossédée de son œuvre personnelle et travaillant dans l'ombre de son mari mégalomaniaque , Margaret s'enfonce dans un mutisme complice. Au nom de quoi devrait-elle garder le silence plus longtemps?
Ce qui frappe avant tout dans ce Big Eyes, c'est la sobriété et l'efficacité de la mise en scène, qui, en à peine une dizaine de minutes, arrive à faire comprendre les principaux enjeux du récit : une femme qui quitte son mari et part avec son enfant à une époque absolument patriarcal, l'arrivée à San Francisco et le mythe du rêve américain qui prend forme et enfin le monde de l'art moderne, ses modes et son business, qui fait encore dépensé beaucoup d'encre et de salive de nos jours.
Big eyes se révèle l' œuvre d'un cinéaste passé maitre dans le dépliement efficace du récit. A tel point qu'on pourrait croire l'œuvre impersonnel. Au contraire, le regard de Burton se révèle très fin et piquant durant toute la première partie. Il met à la fois en évidence le regard unique et le tempérament artistique hors norme de Margaret pour son époque, tout en raillant l'image mondaine et dominante qu'instaure l'exercice et la promotion de l'art.
Visuellement aussi, on pourrait croire que le réalisateur abandonne sa patte. Encore une fois, sous la sobriété se cache un travail extrêmement léché, où chaque plan apporte son idée de cadrage (quasiment tout le film est un plan fixe) de couleur ou de lumière. L'image lisse et colorée, par son côté superficiel, instaure d'elle même une inquiétante étrangeté. Sur ce point le film est une réussite.
Mais l'impression majeure que laisse le film est sans nul doute l'interprétation de Walter Keane par Christopher Waltz. Chouchou de Tarantino, l'acteur allemand s'en donne à cœur joie pour interpréter le rôle du faussaire, dont le culot et l'égocentrisme est à peine croyable et pourtant vrai. Il pourrait presque à lui seul tirer toute la couverture. En face, Amy Adams incarnant Margaret tente de trouver son propre ton. Ses scènes sont souvent touchantes et le personnage est bien aidé par un scénario qui la montre sous un beau jour, juste et plutôt subtil (en même temps la vraie Margaret Keane a participé au film), mais bizarrement le rôle ne prend pas complètement, peut-être à cause du jeu foisonnant de Waltz.
Big eyes se révèle l' œuvre d'un cinéaste passé maitre dans le dépliement efficace du récit. A tel point qu'on pourrait croire l'œuvre impersonnel. Au contraire, le regard de Burton se révèle très fin et piquant durant toute la première partie. Il met à la fois en évidence le regard unique et le tempérament artistique hors norme de Margaret pour son époque, tout en raillant l'image mondaine et dominante qu'instaure l'exercice et la promotion de l'art.
Visuellement aussi, on pourrait croire que le réalisateur abandonne sa patte. Encore une fois, sous la sobriété se cache un travail extrêmement léché, où chaque plan apporte son idée de cadrage (quasiment tout le film est un plan fixe) de couleur ou de lumière. L'image lisse et colorée, par son côté superficiel, instaure d'elle même une inquiétante étrangeté. Sur ce point le film est une réussite.
Mais l'impression majeure que laisse le film est sans nul doute l'interprétation de Walter Keane par Christopher Waltz. Chouchou de Tarantino, l'acteur allemand s'en donne à cœur joie pour interpréter le rôle du faussaire, dont le culot et l'égocentrisme est à peine croyable et pourtant vrai. Il pourrait presque à lui seul tirer toute la couverture. En face, Amy Adams incarnant Margaret tente de trouver son propre ton. Ses scènes sont souvent touchantes et le personnage est bien aidé par un scénario qui la montre sous un beau jour, juste et plutôt subtil (en même temps la vraie Margaret Keane a participé au film), mais bizarrement le rôle ne prend pas complètement, peut-être à cause du jeu foisonnant de Waltz.
La reconstitution de l'époque est aussi un point important du film. Les années 50 et l'ambiance Tiki Pop semblent amuser le réalisateur. Il joue aussi des nombreuses photos et apparition historiques du couple Keane dans la presse en les intégrant dans le film tel quel ou sous forme de pastiche par le biais d'un montage trépidant en milieu de film.
Malgré ces qualités, Big eyes restera quand même un film mineur, malheureusement. Je me demandais comment Burton allait s'en sortir avec une "histoire vraie" qui laisse peu de place à la folie créatrice et l'excentricité. Effectivement le film trouve vite une limite, dont les pantalonnades de Waltz cache mal l'apparition. Passé une exposition brillante et une première moitié de film ironique et fine, le scénario avance en pilote automatique. Le savoir-faire visuel n'empêche pas l'ennui de poindre gentiment le bout de son nez, faute d'une forte remise en jeu de l'histoire (peut-être est-ce le sujet qui vaut ça aussi mais Ed Wood arrivait à faire de l'énergie créatrice de son personnage un véritable élan pour le film par exemple). Pour les plus devins d'entre nous, le film ne présente pas de grandes surprises malheureusement.
Mais quand même, Big eyes reste une bien bel tentative, modeste et maîtrisée, pour laisser un réalisateur au point de vue mûre et formé s'exprimer autour de l'inspiration et du paradoxe du succès artistique.
Si tu aimes...le pop art, les poupées flippantes, les scènes de tribunal...va voir Big eyes !
Big Eyes, de Tim Burton (2015)
Monnki
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